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12 juin 2010

JOURNAL DE DENISE LANDRE

ALGERIE

1939–1945 Récit témoignage D’UNE ENGAGEE VOLONTAIRE DANS L’ARMEE DE L’AIR POUR LA DUREE DE LA GUERRE

EN MEMOIRE DE TOUTES LES FEMMES ENGAGEES VOLONTAIRES

 

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Contact Denise Landre : de.landre@laposte.net

 

 

Image1

 

Mon parcours

Denise LANDRE

Née le 5 Janvier 1926 à Paris

Etudes à Alger

*Engagée volontaire dans l’armée de l’air (guerre 1939- 45)

De 1943 à 1945

Retour à la vie civile à Alger novembre 1945

Reprise des études : « Maîtresse d’Education Physique »

1946-1947-1948 en même temps : « maîtresse auxiliaire » dans les écoles primaires.

1949 dans les collèges Alger, Hussein Dey, et Maison Carrée 1950-51

Même époque: participation aux Championnats d’Alger et d’Afrique du Nord.

Championne d’Alger : Lancement du disque

2 ème aux Championnats d’Afrique du Nord derrière Micheline Ostermeyer qui en 1948 sera sacrée Championne Olympique à Londres.

1952 : Mariage

1955 : Divorce, 1 enfant. Reprise des examens, à nouveau auxiliaire E.P.S.

1957 : Titularisée Professeur E.P.S affectée au Collège Pasteur Alger.

Septembre 1958 : nommée à Bayonne (64)

Septembre 1968 : nommée à Antibes (06)

Septembre 1972 : nommée assistante départementale à la Direction Départementale de la Jeunesse et des Sports à NICE.

Janvier 1986 : Retraite


AFRIQUE DU NORD 1939-1945 LES JEUNES FEMMES ENGAGEES VOLONTAIRES POUR LA DUREE DE LA GUERRE ......

Ou    L’OUBLI

Concernant toutes ces femmes engagées volontaires pour la durée de la guerre… Je ne parle pas de celles dont on connait les actes héroïques, et qui pour certaines dont Denise FERRIER ont perdu la vie, toutes jeunes, sur le front !!... mais de toutes les autres qui ont œuvré, dans l’ombre, remplaçant les hommes mobilisés, sur le front, ou prisonniers, dans des emplois de tous ordres.

Où sont-elles ?? Les a-t-on recensées ?? N’étant pas considérées, pour beaucoup d’entre-elles « Anciens Combattants »… Ne peut-on les reconnaître d’une autre façon ??

Chacune a vécu son expérience de différentes manières, selon les circonstances, sa personnalité, ses antécédents, son milieu socioculturel !!

MAIS, elles se sont engagées dans l’armée…

Voici, la vie militaire de l’une d’entre elles, 17ans et demi, la plus jeune engagée de France dans les formations féminines de l’Air (F.F.A) en novembre 1943.

 

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Références : Mention obligatoire section cinématographique de l’Air. (Photo 976)Etat major d’Alger

 

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et …

A CHACUN SA GUERRE … VOICI LA MIENNE !!

QUELQUES FAITS ET ANECDOTES DE CETTE PERIODE :

Engagée Volontaire dans l'Armée de l’Air (1939-45)

1933 : Départ avec mes parents du Creusot vers l'Algérie.

- Mon père nommé contrôleur des contributions directes à Cherchell

(Cherchell : un des plus beaux souvenirs pour tous, son site, l’accueil, la vie, et la découverte de ses habitants).

1937 : Mon père, nommé  Inspecteur des contributions directes à Alger. (Découverte d’une grande ville ensoleillée extraordinaire)

1939 : En congé en France et en Belgique, mon père est rappelé (comme tous les fonctionnaires) pour rejoindre avant le 3 septembre, son poste.

-Nous embarquons sur le dernier paquebot en partance pour l’Algérie «  Le Pasteur »

(Pas de couchette, un monde fou sur le pont)

LA GUERRE EST DECLAREE

Puis … la suite tout le monde la connait !!!... VICHY

Vichy au Lycée : Tous les matins, les élèves de toutes les classes, bien en rang dans la cour, assistent au « lever du drapeau » et chantent…  « Maréchal nous voilà…!»

-         Un professeur de dessin (femme) réputée pour ses idées … « très proches » de la situation,... nous fait écrire, en cours, les « Messages quotidiens » (avec enluminures) du Maréchal Pétain dont elle fait un recueil… qui est transmis au gouvernement. Chaque élève recevra les « Félicitations » du Maréchal Pétain, expédiées dans chaque famille !! Ce sera fait ....!!

1941 ASPECT et FORME DE RESISTANCE DANS MA FAMILLE

- Pendant ce temps là, ma mère Belge, (qui toute jeune en 1914-18 passait dans les tranchées pour aller chercher de la farine…etc.)

Continue « sa résistance »… ! En accord avec le consulat de Belgique, à Alger, mes parents reçoivent chaque jour … 5 hommes Belges (Avocats, Instituteurs, et un Ingénieur) évadés de Belgique, arrivés en Algérie par des chemins détournés (la nuit ils sont pris en charge par le Consulat de Belgique)

De chez nous, ils émettent, reçoivent, de leur valise « radio » messages sur messages vers des … liens…vers LONDRES… !!! (Pour nous : défense d’entrer dans la pièce !)

Anecdote

Au moindre bruit de clé venant du palier…incroyable !!! En 3 secondes… plus rien sur la table du salon où ils opéraient, la porte est ouverte, on peut les voir jouant aux cartes devant une tasse de café !!!

… Puis nous apprenons leur départ !!

Quelques jours plus tard, ma mère apprend toujours par le Consulat qu’après avoir été repoussés, arrêtés… alors qu’ils tentaient de continuer leur expédition vers le Portugal, déguisés en Arabe !! (Sans en connaître la langue !!!), qu’ils se trouvent dans un appartement, rue Clauzel à Alger…près de chez nous.

… Elle m’entraîne un matin avec elle dans cette rue, au moment où nous passons devant l’immeuble en question… une boîte d’allumettes atterrit à nos pieds …C’est moi qui la ramasse !!

Plus tard…chez nous ma mère l’ouvre : un message pour le consulat demandant entre autres, serviettes, savon…et je ne sais… !!!

- Ensuite plus de nouvelles…jusqu’au jour où nous recevons une carte du Portugal…

-Ces Belges après avoir rejoint Londres… furent parachutés en Belgique… puis cachés…actifs…dénoncés… 3 d’entre eux emprisonnés… exécutés dont un est devenu le plus grand martyre de Belgique.

Nous possédons des lettres manuscrites, et des extraits de livre écrit par un survivant (décédé en 1993), où il fait référence à leur séjour à Alger, en particulier chez mes parents…

1942

Rentrée scolaire : Je n’ai que 16 ans et ne réalise pas et ne sais pas ce qui se passe. A la suite des conditions de plus en plus difficiles… alertes, bombardements (en provenance de Tunisie nous dit-on) etc…le Lycée Delacroix, rue Michelet, ferme quasiment ses portes…

Il nous est possible pour notre classe de suivre des cours 4 heures par semaine ou bien de partir interne à Tizi-Ouzou en Kabylie, ce que mes parents refusent.

CREPS ST EUGENE : BOMBARDEMENTS

Que faire ??

Par une de mes amies, voisine de palier, j’apprends qu’un centre Régional d’E.P.S (formation de monitrices et moniteurs est ouvert, par la Direction des Sports dirigé par Monsieur St André, au gouvernement général d’Alger)

Mon père s’occupe de m’y inscrire (je n’ai donc que 16 ans ½) j’y suis admise comme auditrice libre (trop jeune pour être stagiaire !!!)   Et j’ai la permission de suivre des cours   (4 h par semaine au lycée)

Ce CREPS sis à St EUGENE, banlieue d’Alger, fonctionne, (de 7h à 13h30), au stade en bord de mer… une rue le sépare du grand cimetière d’Alger, lui-même situé en bas de la colline de Notre Dame d’Afrique

Pendant ce temps, nous subissons assez souvent alertes et quelques bombardements.

Descentes dans les caves la nuit !

-Pour cette nuit là : descentes 6 fois !!! Malgré la fatigue, mon amie et moi prenons le tramway à six heures pour nous rendre au CREPS.

Là, découverte macabre : le stade est jonché de couronnes mortuaires, de plaques commémoratives, de croix en bois, d’os humains, de pots cassés…de fleurs…etc… et nous comprenons…qu’une bombe est tombée sur le cimetière !!!

Notre premier entraînement du matin, dit « travaux manuels » est de ramasser et de nettoyer tout le stade pendant des heures…

Anecdote : Monsieur SADI  FERRARI

Le moniteur principal, très sévère, au physique hors du commun très impressionnant, imposant le respect, à l’enseignement du style « marche ou crève » (comme disent les plus âgés), qui n’admet pas que les filles parlent aux garçons, qu’il faut saluer d’une certaine façon (style scout) si nous le rencontrons en ville et surtout ne pas être accompagné d’un stagiaire de sexe opposé sinon : avertissement le lendemain !

Excellent enseignant...

N’est autre que Sadi Ferrari, dont la disparition sera, bien plus tard TRAGIQUE.

Le 8-11-1942

…Alertes…Rumeurs…dans la nuit, très tôt le matin, ma sœur et moi, nous nous installons sur le balcon de notre appartement, cachées derrière les colonnes au 4èmeétage d’un immeuble ancien, (sis 3 rue Jean Rameau, petite rue perpendiculaire au bd Baudin, face au commissariat Central d’Alger), et on apprend avec certitude que les alliés ont débarqué à Sidi Ferruch (c’est l’effervescence dans la maison).

On voit passer Bd Baudin, une « ridicule » petite moto sur laquelle est juché un homme aux grandes jambes, habillé en kaki qui se dirige vers le Commissariat central : (c’est un des premiers alliés sur moto pliable !!). Cela s’active Bd Baudin (on parle de bataille Vichystes et Résistants !!). On déjeune quasiment sur le balcon, vers 14heures tout va très vite : juste en bas de chez nous, Bd Baudin (entre la Rue Berlioz et la rue Jean Rameau) : on entend une voiture, des tirs, en même temps une portière s’ouvre et  un homme tombe à terre.

La voiture est immobilisée, l’homme est emmené en ambulance. On apprend plus tard qu’il s’agit d’un officier résistant LE CAPITAINE PILLAFORT qui décédera le lendemain (une stèle sera élevée en son nom Rue Berlioz et rapatriée en France il y a quelques années)

Les alliés s’installent…

1943

Le stage de St Eugène continue quelques temps, puis s’arrête.

Plusieurs jeunes femmes décident de s’engager dans l’armée dont Denise FERRIER (en mai 1943) avec qui je me suis liée d’amitié : je l’admire, elle est gentille et se prénomme : « Denise » aussi.

Hélas, son destin Héroïque sera tragique : puisque tuée au Champ d’Honneur, dans l’est de la France en Août 1944.

Novembre 1943

Parce que Denise Ferrier s’est engagée.

Parce que les appels à s’engager fusent en ville.

Parce que j’ai besoin d’agir…

Alors, je demande à mes parents de faire les démarches… afin que je puisse m’engager… je n’ai que 17 ans et 10 mois !!!

Mon père, après  pas mal de réticences, accepte !!

L’officier responsable du bureau de recrutement de l’armée de l’air, après m’avoir fait passer des tests de connaissances générales, me fait signer un engagement, auquel mon père joint « une émancipation de sa part, et demande également que je sois dirigée vers un stage qui me permettra… plus tard, éventuellement d’avoir une situation !! C’est ainsi que je suis intégrée, sans que j’ai à choisir, dans les transmissions: Ecole de Dellys (à peu près à 100km d’Alger) et nommée Elève Stagiaire – Radio Electricienne !!

DELLYS

A Dellys, vie de garnison, on y fait « ses classes » : la discipline… on apprend à marcher au pas…pour celles qui ne savent pas… à s’arrêter en rang, etc… Nous sommes en chambrée de 14.

Les cours : Electricité, physique, apprentissage du morse…cours traditionnels de français, etc...Tout ceci en vue de devenir : Radio Electricienne !! Éventuellement attachée au ministère de l’air ! Je ne suis réellement pas emballée… !!

Un autre groupe se joint à nous pour faire ses classes et rejoindre ensuite RABAT, pour  suivre, un des stages qui y sont offerts.

A savoir : Rédactrice, secrétaire- comptable, comptable.

Très intéressée par ces stages, je pense faire une demande dans ce sens…

Je me lie d’amitié avec Jeanine Pouységur institutrice, donc…engagée, dont le mari médecin est prisonnier en Allemagne. Elle me prend sous son aile.

JANVIER 1944

Au retour d’une permission accordée pour les fêtes du 1er de l’an, les cars qui nous ramènent à Dellys, se télescopent….

« Juste à l’entrée d’une petite ville, l’Alma : entre un camp hôpital américain… et le cimetière, de l’autre côté de la route !! »

Projetée sous le tableau de bord entre le levier de vitesses et la porte… je souffre fortement du genou droit…

Des américains du camp arrivent, veulent me soigner. Je refuse et rentre avec les autres, allongée à l’arrière du car qui peut repartir.

A Dellys : radiographies, on décèle une double entorse et décollement de la rotule.

Soins et deux semaines de repos ne viennent pas à bout de mes souffrances.

*Stage interrompu, transfert à l’hôpital militaire Maillot à Alger J’y reste du 21/1/44 au 21/2/44.

Anecdote vraiment INCROYABLE

Retour en Arrière :

« Dans la nuit du 23/12 au 24/12/1942, alors que chez nous on parle peu politique ou événement…je rêve que je suis l’Amiral DARLAN, assis derrière mon bureau… ! Un homme revolver au poing entre dans la pièce en criant : «  Vous êtes Darlan…Je vais vous tuer !!! »

AMIRAL DARLAN

Le 24 /12 au matin j’en parle, bien sûr à mes parents, mon père sourit, ma mère est intriguée, elle croit aux rêves prémonitoires !

J’en parle également à mon amie de palier.

A 13 heures, cette dernière sonne chez nous pour me montrer la « une » de « Dernière Heure » (qui parait le dimanche après-midi) traversée d’une bande noire… annonçant «  L’assassinat de l’Amiral Darlan … dans son bureau ». On peut imaginer mon bouleversement !!

*On repart à l’hôpital Maillot… je recommence à marcher, avec des béquilles, seule vaillante dans cette grande salle séparée d’une autre par un rideau… un médecin me demande de prévenir le médecin de nuit au 1erétage… si toutefois… « La jeune patiente très malade » que l’on vient d’amener, se manifeste (c’est la guerre – Hôpital militaire, pas d’infirmière !)

En effet au milieu de la nuit : gémissements, prières dont les fins de phrases se terminent en plaintes…je vais voir la patiente qui la tête cachée sous son drap… se plaint de plus en plus…

Je descends avertir les médecins qui emmènent aussitôt la jeune fille !! Le lendemain, nous apprenons son décès (méningite dit-on !)

Et…son nom : BONNIER DE LA CHAPELLE

Elle est la sœur du jeune homme qui a assassiné l’Amiral DARLAN

Incroyable non !?

Nouvelle affectation : MGA LA REDOUTE ALGER Février 1944

Je suis dirigée à ma sortie de l’hôpital (d’où j’ai fait une demande afin de rejoindre le stage de secrétaire rédactrice) vers la base 320, quartier Hélène Boucher, la Redoute-Alger- Direction du personnel féminin EMGA, où je retrouve le groupe de Dellys…en attente du départ pour RABAT.

D’autres engagées se sont jointes à nous dont plusieurs de Tunisie.

Nous sommes logées dans des chalets.

Le personnel féminin de l’armée de l’air est recruté parmi toutes les couches sociales de l’Afrique du nord : Lycéennes, étudiantes, universitaires, secrétaires, dactylos, rédactrices, infirmières… etc…celles qui n’ont aucun bagage intellectuel, celles qui n’ont jamais travaillé, celles dont le mari ou un proche, est soit sur le front, soit prisonnier, puis celles ayant uniquement le souci d’être utiles, celles désireuses d’apprendre tout en participant à la guerre,… et d’autres !

Propagande de l’armée de l’air  F.F.A

Pour étayer ce recrutement, l’armée de l’air lance des actions de propagande.

C’est ainsi qu’un matin, une stagiaire et moi-même (une grande brune ! une grande blonde !) sommes convoquées au bureau du commandant, avec recommandations de se présenter en  tenue de « sortie » (bleu marine) car nous disposons d’une tenue américaine kaki (toutes deux nous ont été distribuées à Dellys lors de notre engagement).

Nous sommes désignées pour être à la disposition de la section cinématographique de l’armée de l’air pour des prises photographiques dans les bureaux, en extérieur, en studio (flatteur ! mais fatiguant) et nous l'apprenons plus tard, afin de figurer sur les affiches « Engagez vous dans les formations féminines de l’armée de l’air – F.F.A »

Cette propagande passe également dans les cinémas à l’entracte aux « actualités » tandis que les affiches sont distribuées partout…Algérie-Tunisie-Maroc

Centre Ecole de RABAT   : 15/04/1944

Affectation au centre école de Rabat, voyage interminable.

Nous sommes accompagnées par un adjudant… masculin. Installation à la base aérienne.

L’ambiance est excellente, nous logeons dans des chalets (style préfabriqué) mes camarades plus âgées que moi m’aident pour certains cours, d’autant que quelques unes d’entre elles suivent le stage de rédactrice, dont Jeanine Pouységur que j’ai retrouvée.

Nous étudions beaucoup, dans ce camp réservé au personnel féminin, nous bénéficions d’activités sportives… ce qui n’est pas pour me déplaire… j’aide même pour certaines disciplines.

D’autre part, nous devons également assurer chacune notre « tour de garde » nuit et week-end.

Anecdote  Les « ARRÊTS »

C’est mon tour ce week-end…je dois m’occuper plus précisément de l’occupante d’une chambre verrouillée et à barreaux !!Cette engagée, une bretonne fiancée avec un marin, (embarqué sur un bâtiment militaire, soupçonné « d’espionnage ») est aux arrêts !

Elle est prostrée sur son lit…pleure beaucoup.

Elle a le droit de sortir, bien sur, accompagnée, une heure par jour. Elle a le droit de téléphoner, et moi l’obligation de lui demander le nom et le numéro de son correspondant… et d’écouter la conversation afin d’en rendre compte à l’officier supérieur !

C’est très pénible – C’est tant de peine !

A l’issue des stages, nous devons passer un examen – les trois premières de ma catégorie, (secrétaire-comptable), sont affectées à la base aérienne de Casablanca, école de Comptabilité « perfectionnement »

Les rédactrices sont nommées directement sur un poste – le groupe éclate.

C’est à ce moment que j’obtiens mes premiers galons : Adjudant !!! 3èmedu stage !!! (La première : Lieutenant, la deuxième : sous-lieutenant) Rien à voir avec les grades de l’armée régulière !!

15/06/1944 : Ecole de perfectionnement à Casablanca

Base aérienne de Casablanca : les bâtiments de logement sont d’anciens casernements, de nombreux baraquements sont installés pour d’autres activités – lecture – discussions – théâtre, auxquelles plusieurs d’entre nous participent.

Les cours de comptabilité sont très difficiles. D’autres disciplines sont dispensées : Français, Philosophie, Mathématiques.

Anecdote : Libération de Paris

Hospitalisée  pour soigner un flegmon à l’hôpital militaire de Casablanca où il n’existe pas de secteur féminin… je suis installée dans une chambre isolée à barreaux… réservée aux « malades mentaux » !!!

C’est là que le 25 Août, médecins, infirmières défilent à tour de rôle dans ma chambre, pour m’annoncer la LIBERATION DE PARIS. Ils viennent tous, apportant des gâteaux (je ne peux que difficilement avaler)… mais je peux et je veux boire, même dans un gobelet,  le Champagne !!        Je suis née à Paris !!

30/09/1944 : BLIDA – ALGERIE

C’est la fin du stage, nous passons nos examens… une de mes camarades et moi sommes affectées au Dépôt 201 à Blida « services des délégations des soldes et comptes particuliers ».

Des bureaux immenses sont installés dans une caserne en centre ville – le personnel est nombreux, peu de femmes et quelques civils, nous sommes bien accueillies. Le personnel féminin loge au « quartier Montpensier » à environ un kilomètre du centre.

Une navette effectue des allées-venues matin, midi  et soir.

En plus de mes activités au dépôt 201, je suis désignée  « adjointe » à l’officier féminin, (Capitaine), qui dirige le camp. La discipline est de rigueur, tout est vérifié au départ de la navette le matin : tenue et propreté des chambres, tenues vestimentaires.

Chaque chalet comporte trois chambres à deux lits et une réservée pour la responsable de chaque bâtiment… et je suis aussi…responsable de mon chalet !

Dans la majorité, le personnel de ce camp est peu ou pas gradé. Même vie que précédemment… tours de garde etc...

Anecdote surprenante ! « Les arrêts »

Un chalet au fond du camp attire mon attention, il est gardé par un soldat en armes jour et nuit ! Très vite, j’apprends qu’une engagée volontaire y est aux arrêts… « Pour espionnage », elle doit être transférée à Paris. Un matin, branle-bas de combat au camp… la prisonnière s’est enfuie !! A sa place, comme au cinéma, on trouve un traversin !! – avec quelle complicité ??

Toutes les suppositions sont avancées !!C’est un choc ! C’est à ce moment là que son nom m’est révélé : cette jeune femme n’est autre que celle qui a participé à « l’action de propagande » avec moi, à la Redoute à Alger.

Lors de mes week-ends de garde, pour celles qui ne partent jamais en permission, de mon plein gré… j’organise des promenades, goûters, discussions sur des nombreux sujets !

Ce camp comporte un mess - un foyer

Personnellement, je suis autorisée, bien que sous-officier, à déjeuner avec mes amies, infirmières, ambulancières, officiers…au mess des officiers où nous sommes séparées des hommes par une cloison !!!

Centre ville : Le foyer

Nous nous rendons chaque semaine, une camarade et moi à la bibliothèque, d’un autre foyer en ville, dirigé par un séminariste. Dans une salle, quelques tables y sont installées pour y lire, pour y discuter mais en même temps y déguster un « mauvais café, ou jus de fruit et pauvres sandwichs » distribués contre une modique somme, par un militaire campé derrière un petit guichet au fond de la salle.

Très vite, nous nous impliquons pour les aider « certains week-ends ». Nous remplaçons le militaire, améliorons l’ordinaire en quantité, en variétés, marquant les jours de fêtes par des petits « extras »… (Crêpes etc…). Nous remplissons les caisses du foyer !! Cela nous amuse, mais le dimanche soir à 20h… pas de navette pour rentrer au camp (avant 21h obligatoirement)

Nous avons à parcourir plus d’un kilomètre à pied, la peur au ventre sur une petite route déserte, une matraque à la main !!

8 MAI 1945 ARMISTICE

Tous sur la « Place d’armes » à Blida, civils et militaires confondus, autour du kiosque, la fanfare succède aux discours, aux applaudissements…

INCIDENTS

En provenance des deux rues qui jouxtent à gauche et à droite un immeuble à colonnes, des hurlements s’amplifient !! En courant des arabes munis de fourches foncent sur nous, des pavés volent dans tous les sens.

C’est l’affolement, je n’ai que le temps d’attraper une personne petite et âgée qui est devant moi, pour aller en courant nous abriter sous les arceaux, près du mess des officiers.

L’HORREUR

Tout est vite réprimé : quelques jours plus tard un jeune militaire, rentrant de permission de Guelma, nous apprend... l’Horreur !!!

Pendant que nous étions attaqués, lui trouvait sa famille priant devant un autel de fortune (Sur une table de cuisine) bougies allumées, pleurant, entourée de fidèles ouvriers de la ferme, tous effrayés. Il nous dit aussi avoir croisé… un curé assassiné sur sa moto… le cœur accroché au guidon !! C’est l’horreur !!

C’est bien plus tard que nous apprendrons l’intervention de la France.

Cérémonies officielles

En plus de notre travail administratif, avec une ou deux autres engagées, je suis de toutes les cérémonies officielles pour représenter l'armée de l'air, avec l’armée de terre, et la marine !! Je suis très fière…

Cela va du « jour de l’an », au 14 juillet, au 1ernovembre, et depuis cette année le 8 mai ! La plupart du temps, nous nous rendons dans les cimetières français, juifs, arabes où des gerbes sont déposées !!

Dilemme : Affectation  Oran ou Paris ?

Convoquée par le commandant Conquy dont nous dépendons, j’apprends que l’Etat Major général de l’Air, lui a fait parvenir une note de service lui demandant de désigner selon certains critères, une engagée volontaire, susceptible de diriger le bureau de recrutement (maison des ailes) à ORAN !!

Il pense à moi et m’assure également que dès lors je serais nommée Lieutenant !

Très gênée, je me sens obligée de « quasiment » refuser cette offre « magnifique » et de lui confier que pour des raisons importantes (je lui donne certains détails) ma famille de Paris qui m’a élevée, quelques années , est en train d’œuvrer afin que je sois « rappelée » par le Ministère de l’Air : (ce qui ne se fait qu’exceptionnellement et de toutes façons pour des personnalités… d’où mon immense gêne ! )

AFFECTATION A PARIS !!!

Le commandant décide d’attendre 5 jours pour répondre ! S’il n’a rien reçu de Paris d’ici là… je serais affectée à Oran. L’incertitude est insoutenable. Le quatrième jour de cette attente, arrive un télégramme officiel me rappelant à Paris.

Anecdote «  de quoi rire ! Incroyable » Le monde est à l’envers !

Devant cette réalité, le commandant me convoque, et m’annonce qu’il met sa voiture, (une déesse), et son chauffeur à ma disposition !!!… pour me rendre à l’aérodrome de Boufarik à 10km environ de Blida. (Pas d’autre moyen de transport…sauf  l'opportunité d'un déplacement : camion militaire ou ambulance) …

Tout va très vite, je pars le surlendemain…il pluvine, à l’aéroport un soldat, parapluie ouvert à la main, m’ouvre la porte !! Surprise !! Ce n’est pas un « officier supérieur » qu’il accueille, mais ....une jeune femme militaire… et par surcroît « adjudant » !!

BOUFARIK JUIN 1945

Le trajet prévu en avion : Boufarik – Toulouse, puis  Toulouse – Paris en train !!

Ce petit avion ne comporte pas de sièges traditionnels, uniquement : deux madriers posés dans le sens de la longueur, sur deux fûts métalliques où des personnes sont déjà installées.

Nous sommes bien sûr, peu nombreux, deux officiers et leurs épouses, peu causants, un officier et  trois enfants, une assistante sociale qui les accompagne, moi et l’équipage (ils sont deux)

Très vite l’officier, père des trois enfants à besoin de raconter son retour en France. Son épouse, elle, à l’article de la mort, est rapatriée sanitaire par bateau…il est effondré. Le plus petit des enfants, s’accroche à moi… je m’en occupe durant tout le trajet qui est très long !!

TOULOUSE

Notre « coucou » a beaucoup de mal à atterrir par un vent violent…j’ai peur !! Nous sommes transportés de l’aéroport à Toulouse par camion !! Seule sous-officier du groupe, je dois me rendre au foyer de la gare, pour y dîner et y dormir !!

Malgré sa détresse, le père des enfants visiblement soulagé d’être enfin en France, tient à nous remercier tous, de l’avoir écouté, de nous être occupé des enfants, 3 ans ,7ans et 11 ans.

Il décide de tous nous inviter (voyageurs et équipage) à dîner au restaurant de l’hôtel où il doit descendre.

Il s’arrange pour que je n’aille pas au foyer…ainsi je dormirai dans la chambre de l’assistante sociale, avec deux des enfants.

Le repas : dans l’arrière salle du restaurant… au menu : CASSOULET !!  Au marché noir !!

Je dors dans un petit lit, le petit garçon de trois ans contre moi. Tôt le matin, petit déjeuner toujours dans l’arrière salle.

L’officier ayant des démarches à faire avec l’assistante sociale, me demande de m’occuper des enfants, durant un temps, avant de nous rendre à la gare.

Il me donne une petite somme d’argent afin de les occuper… bonbons, revues… et éventuellement manège… il y en a !!!

A la gare, alors que je n’ai droit qu’aux deuxièmes classes, l’officier s’arrange pour que je voyage avec eux en première !!!…

PARIS

A Paris, nous nous séparons : je dois me rendre Rue Blomet, eux Gare de l’Est.

L’officier ne cessant de me remercier de m’être occupée pendant tout ce temps de ses enfants, hèle un des rares taxis et règle le trajet…je suis confuse.

Je n’ai jamais su leur nom, et bien sur ce qu’ils sont devenus !!!

Rue BLOMET ! Est l’adresse de l’hôtel réquisitionné où peut loger le personnel féminin de l’armée de l’air.

Ce sont des petits appartements meublés .Les repas sont servis à quelques immeubles de là, dans un restaurant, faisant office de mess.

Anecdote incroyable !

Le studio qui m’est affecté est sombre et donne sur une cour… j’ouvre la fenêtre pour aérer…et…je crois à un mirage !!!

Je vois en face une jeune femme fumant à la fenêtre : c’est ma voisine de palier d’Alger !!! Partie bien avant moi pour rejoindre les Forces Françaises Libres en Syrie (je crois) sans mot dire à sa famille (j’étais la seule dans la confidence). Elle est officier. Nous logeons dans le même hôtel ! Il suffit de longer le couloir qui fait un angle et je suis dans son appartement : deux pièces qu’elle partage avec une amie actuellement à l’hôpital, et qui doit rentrer dans sa famille.

Mon amie se rend à l’accueil…explique la coïncidence et obtient très vite que je m’installe avec elle.

C’est la joie, les rires, notre « histoire ». C’est formidable !!

MINISTERE DE L’AIR 26/06/1945

Après quelques jours de permission en famille… je rejoins mon affectation, au Ministère de l’Air, 8èmebureau : service des archives dans les sous-sols.

Très bon accueil, curiosité …Il n’y a que des hommes !!

Beaucoup de travail me dit-on…

JEANINE POUYSEGUR

L’après-midi de mon arrivée, alors que je me rends aux toilettes, à l’angle d’un immense couloir… je me heurte à une personne… qui n’est autre que Jeanine Pouységur, devenue Capitaine.

Je ne l’ai plus revue depuis Rabat !surprises, embrassades, rires…

Je lui apprends dans quel service  je suis affectée depuis le matin   … et elle d’ajouter : « Demain, tu seras dans le mien !! »

Direction du personnel Féminin de l’armée de l'air - EMGA

Le lendemain, l’officier, chef de service, m’appelle et m’annonce qu’il est désolé  d’avoir déjà à se passer de moi…mais je dois rejoindre au 3èmeétage, le service de la direction du personnel féminin de l’air en France que dirige Madame le Commandant DUMESNIL, au cabinet du Général ANDRIEU.

Je me sens à la fois toute petite, sur un nuage et si contente.

Je rejoins mon nouveau poste, dans le bureau de Jeanine Pouységur, qui m’apprend que son mari, Jean Pouységur, prisonnier, s’est trouvé à participer à la LIBERATION DE PARIS (en temps que médecin pompier) et a été exécuté d'une balle dans la tête le 25-08-1944. Une plaque commémorative est apposée Gare du Nord !!

J’ai beaucoup de travail, je suis assise devant un grand bureau, je bénéficie de deux téléphones (un extérieur, un intérieur…) Quel événement pour moi !!

C’est en manipulant des dossiers que j’apprends que la « Prisonnière de Blida » a été révoquée…elle n’est pas la seule !!

C’est à Paris que j’entends pour la première fois aux stations de métro : ces lettres : « P.P.O » au début je n’y fais pas attention… puis devant la répétition, à divers endroits…je m’enquiers auprès de mon amie avec qui je loge, de la signification de ces lettres ainsi formulées… Elle ne peut que sourire pour  bien sûr les avoir déjà entendues… elle traduit : Poule Pour Officier !!!!

C’est lamentable : que c’est triste, que cela fait mal !!! A part cela tout se passe formidablement bien.

Fini les tours de gardes etc… Je passe mes week-ends en banlieue dans ma famille.

Je me rends quelques jours en permission à Bar-sur-Aube chez ma grand-mère ; mais au fur et à mesure que les mois passent, la guerre étant terminée, de nombreuses F.F.A résilient leur contrat.

De mon côté, j’ai le choix : de rester dans l’Armée de l’air… (On parle de possibilités de partir en Indochine… ce n’est pas pour me déplaire)…ou de résilier mon contrat pour retourner vers la vie sportive, et préparer mes examens.

C’est cette dernière solution que je choisis, j’aimerais rester en France pour ce faire…

Je me présente en uniforme rue Labourdonnais à Paris – Direction des Sports…afin de m’inscrire dans un CREPS … la réponse est claire… « Vous êtes d’Alger alors retournez y, ici on ne peut vous accepter…il y a trop de postulants de la métropole ! À Alger un CREPS va être ouvert !!!

(Il ouvrira des années … des années après !) C’est ainsi que je décide de rentrer à Alger, chez mes parents : 3 rue Jean Rameau, à Alger.

20/11/1945

Mon contrat est résilié le 20/11/1945

Je rentre à Alger, le cœur léger, heureuse avec le sentiment d’avoir à mon niveau et très modestement certes, œuvrer pour la France.

J’ai vécu une expérience humaine enrichissante à tous points de vue, faite entre autres, de découvertes, de rencontres, d’amitiés, de joies, d’humour.

J’ai aussi approché des cas de grande tristesse !!

Je me sens très forte pour affronter les réalités de la vie civile.....

RETOUR A LA VIE CIVILE A ALGER DE NOVEMBRE  1945  à SEPTEMBRE 1958

Novembre 1945 : De retour à Alger… Pas de CREPS ouvert…il y en aura un…quand ??

Par les relations de mes parents, nous apprenons qu’un groupe de professeurs et moniteurs, à titre privé assurent la préparation des futurs moniteurs et professeurs d’E.P.S aux « GROUPES LAÏQUES » chemin Yusuf à Alger.

Je m’y inscris… la réadaptation est difficile.

Une page de SPORT à Alger 

 

A la faveur de nos cours et entraînements… on découvre… que je lance bien le disque et que je cours…pas mal sur le 800 Mètres !!

C’est ainsi que je remporte « le lancer du disque » au « CHALLENGE CARDONNA » rencontre annuelle et bien connue des Athlètes à Alger.

Je deviens ensuite Championne d’Alger dans la même discipline… tout en battant le « record d’Alger »…détenu depuis 10 ans par une Athlète de « l’ALGERIA – SPORTS ».

(Je n’ose dire la distance, quand on sait ce que font les lanceuses actuelles)

Anecdote

Je ne sais même pas ce que veut dire « le petit drapeau » au sol… là-bas…que mon disque vient…de dépasser !!!...

Aux championnats d’Afrique du Nord, je ne suis que seconde… avec 30 mètres… l’athlète qui sévit actuellement sur les stades est Micheline Ostermeyer (de Tunisie) avec 32 mètres, sélectionnée pour les Jeux Olympiques de LONDRES (1948) … Elle atteindra 42 mètres et deviendra « Championne Olympique ».

Les GROUPES LAÏQUES ont depuis de nombreuses années, crée, une rencontre d’ATHLETISME, qui se déroule annuellement et alternativement à ALGER et à ORAN : … Ce sont les « RELAIS D’ARGENT »

Toutes les disciplines sont représentées. J’y participe et remporte le lancer du disque, à ORAN.

1948  à 1951 : Auxiliaire d’E.P.S

Nous sommes sollicités, nous, étudiants pour assurer des cours d’E.P.S dans les écoles primaires d’Alger et ses environs, ainsi que dans quelques Collèges.

J’accepte et … me voici Auxiliaire d’E.P.S, pour un an renouvelable.

Dans ce même temps, je m’essaie au Basket-ball, deviens Capitaine d’une équipe bien placée dans son groupe…

Ceci dans une petite commune « L’ALMA » proche de MAISON-CARREE où j’exerce au Collège depuis 2 ans.

Parenthèse

Mariage : Un congé d’un an renouvelable pour 3 ans maximum m’est accordé, afin de suivre mon mari, dans les douars, entrepreneur de travaux publics, qui construit pour le Gouvernement Général (par appels d’offre) des écoles, avec logement pour les instituteurs français !!! (Écoles détruites pour la plupart…  plus… tard !!!)

Naissance de notre fille. Actuellement, nous sommes à MICHELET – Kabylie.

31-10-1954  ..........1-11-1954

Veille de la Toussaint ! Ce jour là 31-10-1954… mon mari décide de  rentrer à FORT DE L’EAU (notre domicile). C’est le soir.

Trois de nos ouvriers, nous demandent de les « redescendre » à ALGER.

Sur la route qui nous mène à Tizi-Ouzou ma fille est prise d’un besoin pressant…je m’arrête… et oui, c’est moi qui conduis !! Mon mari lui s’occupe de notre fille… alors qu’il descend de notre voiture cinq minutes… moi, je m’extasie, de mon côté, sur les feux d’une Fantasia…qui se passe là-bas…sur l’autre versant de la colline !!

Ce n’est que le lendemain matin, 1erNovembre, que nous apprenons l’HORREUR !

En fait de FANTASIA … C’est le début des émeutes… c’est la Guerre d’ALGERIE !!

Avec tout ce que cela comportera de drames !!!

La Peur à retardement

Nous pouvions être tués sur place dans notre véhicule… (Même si mon mari… par habitude garde toujours un fusil sous le siège avant de la voiture).

Les trois ouvriers…transportés ont disparu.

Sans « jeu de mot » je pense qu’ils ont dû être « morts de peur » d’être à la merci d’une « Femme au volant »… Pensez à l’époque !!

Je ne retournerai plus à Michelet !

De 1955 à 1958

…Divorce. Je vis à Alger.

Je reprends un poste d’auxiliaire…repasse des examens au titre de « victime de la guerre 39-45 », suis titularisée avec effet rétroactif…nommée en 1958 à BAYONNE (je n’ai jamais demandé ce poste) à cause de la lenteur administrative, ceux que j’avais sollicités …sont pourvus !! Mais quelle aubaine. Ma sœur et sa famille vivent à St Jean de Luz !

Pendant ces années là,… LA PEUR s’installe… :

Dans la rue, en apercevant le moindre papier dans un caniveau … : On traverse !

Un scooter avec sacoches stationné le long du trottoir… : On traverse !

Quelques pas …derrière soi… : On s’arrête…sous n’importe quel prétexte … afin de se laisser dépasser,  pour voir !

Anecdote - triste et drôle  à la fois

Avec deux amies, nous rendant à la « Grande-Poste », nous nous sommes jetées au sol…au bruit infernal que faisait un rideau de fer…que baissait… un commerçant entre 12H et 14H !!

Vérifications d’identités

Quelque chose m’intrigue de plus en plus : que je me déplace en bus, en tramway, que je franchisse les portes d’un établissement public, systématiquement les militaires de service, me demandent mes papiers, me font ouvrir mon sac, (pas aux autres passants alentours).

Il faut dire que mon grand sac contient mon équipement sportif…cahiers…etc...

Interpellation

Après avoir assuré mes cours au stade des GROUPES LAÏQUES, et pour me rendre à l’Hôpital MUSTAPHA (par l’entrée « du bas ») afin de visiter une de mes amies (blessée par un engin placé dans un poteau d’arrêt d’autobus)…j’emprunte la rue de Lyon, traverse une placette où se trouvent quelques marchands ambulants (cacahuètes etc.….) et des passants. Juste à hauteur du « CHAMP DE MANŒUVRES »au moment de traverser,

Je suis interpellée : « Mademoiselle, s’il vous plaît, voulez vous me suivre… »

C’est un policier…mitraillette au poing qui me dirige vers  un fourgon, qui est stationné là ! A l’intérieur du fourgon : deux policiers masculins à l’avant, et une femme à l’arrière.

Un des policiers avec mes papiers se met en liaison par radio…...avec  un commissariat …..je pense ! L’autre surveille tandis que celui qui m’a interpellée est resté à l’extérieur.

La femme policier, (je suppose), elle, vide entièrement mon sac de sports, et avec un air circonspect, tire doucement… sur un ruban…au bout duquel…apparait…un « sifflet » !

Catastrophe !! Quand on pense à l’ambiance du moment en Algérie !!!

Elle me demande : Qu’est ce que c’est ?sur un ton qui n’admet pas la plaisanterie… (J’avoue que je n’ai pas envie de plaisanter…je pense à l’heure…il faut aussi que j’aille chercher ma fille à l’école !!)

Je réponds : -Un sifflet (c’est si évident !!)

Comprenant qu’elle n’a pas posé la bonne question…elle reprend :

-A quoi cela sert ???

…Je lui explique que nos cours se font aussi à l’aide d’un sifflet !!

On me relâche au bout de ¾ d’heure, devant le fourgon…il y a foule !...

Pensez,  une française arrêtée !!!

Je suis toute rouge et poursuis mon chemin complètement choquée.

Explications de ces interventions

Je profite d’un déjeuner chez ma propriétaire, qui reçoit un couple d’amis dont le mari est administrateur des colonies. (Je crois…) à MASCARA…pour raconter mes mésaventures.

Aucune hésitation pour l’administrateur…je  ressemble terriblement à la « française » qui a rallié la cause « fellagha », et dépose des bombes dans des sacs de sport… (Dans des lieux publics : Cafétéria…etc.)

A sa visite suivante, ce Monsieur me montre une photo « anthropométrique » de cette femme… c’est saisissant !!!

C’est ainsi  que pendant un temps, alors que je suis blonde…je me fais teindre en brune !!!

Octobre 1957

Affectée, toujours auxiliaire, au Collège Pasteur à Alger, j'attends ma titularisation !!! (Presque 2 ans)

13MAI 1958

Nous sommes le « 13 MAI », je suis avec mes élèves…au stade LECLERC (il surplombe le Gouvernement Général et le boulevard LAFERRIERE) un collègue s’approche de moi (le téléphone « arabe »…fonctionne) et m’avertit de l’arrivée d’une autorité en provenance de Maison-Blanche, l’aéroport…il me conseille de m’asseoir avec mes élèves dans des bougainvilliers…le long de la palissade…en pente…Nous nous asseyons et attendons.

Tout alentour est silencieux…une rumeur…en provenance du boulevard LAFERRIERE enfle…plusieurs voitures noires passent en cortège en bas de la palissade.

En 5 minutes, la place du Gouvernement Général est noire de monde qui afflue de tous les sens…

Toutes les fenêtres, les balcons d’immeuble du boulevard  LAFERRIERE sont comme par magie devenus « BLEU, BLANC, ROUGE » (habillés de drapeaux, de banderoles etc.…)

Au balcon du GOUVERNEMENT GENERAL apparaît le GENERAL DE GAULLE… aux cris de « ALGERIE FRANCAISE »  etc. …

Je me laisse dire que toutes ces personnes…qui convergent là…étaient en attente depuis des heures, pour certaines, dans des endroits… tels que les cinémas !! Etc...

C’est une vision que l’on ne peut oublier.

Pendant les premiers jours qui suivent, la Directrice du Collège préfère que nous ne nous rendions pas au stade…vu l’effervescence qui règne à Alger !!

Je reste dans une classe et fais des cours théoriques…

Un jour…c’est un concert de « klaxons » dont les sons montent du boulevard Pasteur…jusqu’à nos oreilles !

Cela donne : 3 petits coups… 2 petits coups ! En clair : AL-GE-RIE…FRAN-CAISE !!

Ce qui est amusant, c’est de voir d’en haut de nos fenêtres les mains des automobilistes…en mouvement sur le klaxon, ceux qui montent 3 coups ! Ceux qui descendent 2 coups !

A croire qu’ils ont répété.

Mes élèves enchaînent sur leur bureau !

Voilà… en Août enfin titularisée, nommée à BAYONNE, je m’embarque avec ma fille pour la France en emportant tant de souvenirs !!

…de 26 ans en ALGERIE.

ET......

IMG_6178

PALAIS DES CONGRES  de JUAN LES PINS   - AVRIL  2009- RASSEMBLEMENT NATIONAL DES RAPATRIES D’AFRIQUE DU NORD

STAND : FRANCOIS PAZ - C.L.A.N-R

Denise LANDRE

Retour coups de cœur. 

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Commentaires
P
Bonjour Madame,<br /> <br /> A Dellys auriez vous souvenir d'une jeune femme originaire du Maroc nommée Garigue. <br /> <br /> Henriette je crois ?<br /> <br /> Elle fut reçue a l'époque dans ma famille à Hydra ; Hydra ou demeurait la famille de Denise Ferrier (Rue Aspirante Denise Ferrier)
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P
Chère Madame<br /> Je découvre votre belle biographie et cette vie sous les plis du drapeau tricolore dans les forces aériennes et merci de nous la faire partager.<br /> Depuis l’age de 17 ans jusqu’en 1986, vous avez consacré 43 ans de votre existence au service de notre France d’avant, l’éternelle, celle des Duguesclin, Charles Martel, Bayard, Jeanne d’Arc et tant d’autres avec lesquels au lu de votre carrière, vous avez votre place.<br /> Je n’ai pas l’honneur de vous connaître, mais acceptez mes respectueux hommages à titre personnel et au nom de nos compatriotes dont vous êtes l’un des plus beaux fleurons, pour votre courage et votre abnégation. <br /> Que Dieu vous prête vie en temps, longtemps.<br /> Votre serviteur<br /> PIERRE SALAS
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D
Par le biais de :" LE COIN DU POPODORAN "..ce petit Journal avec la modeste pretention que certaines de ces jeunes engagees volontaires se .." retrouveront " ( ou quelques membres de leur famille )mais il y a si longtemps..qu'elles sont OUBLIEES qui sait ?<br /> Denise LANDRE
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B
Merci pour le récit d'une belle et étonnante tranche de vie
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H
Une vie , assurément bien remplie , avec toute une panoplie d'anectotes, de dangers . Je ne suis née qu'en 1949 et la seconde guerre mondiale était derrière moi. Je vous félicite pour le devoir -le devoir de vie- accompli ! Geneviève HALET -
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