IL ETAIT UNE FOIS,
LES SPORTS LA-BAS
Document transmis par Pierre Salas 12/02/10
Il ne faut pas toucher aux idoles: la dorure en reste aux mains. (Gustave Flaubert)
Cet article, je l’avais rédigé, il y a quelques années, mais les évènements sportifs se succédant rapidement au fil des ans et la vie modifiant toujours les prévisions, j’ai tenté de réactualiser cet article qui avait bénéficié d’un succès d’estime, il n’y a pas longtemps encore. C’est ce que je fais pour vous mes estimés compatriotes.
En Afrique du Nord, la boxe a toujours drainé les passions et notre creuset a toujours été de qualité.
Lorsque l’on évoque le souvenir de notre Marcel Cerdan, les anciens se souviennent avec émotion, qu’en ce temps-là, la télévision était encore balbutiante en France et seulement un rêve chez nous, en Piednoirdie.
Alors, on s’agglutinait autour de la TSF pour les privilégiés qui la possédait, ou on allait chez le voisin plus fortuné qui voulait bien organiser une veillée chez lui pour écouter l’évènement.
C’était une réunion entre supporters acharnés du grand marcel, entre amis et parents, entre initiés, malgré l’heure tardive (souvent 4 heures du matin, à cause du décalage horaire, avec les Etats- Unis).
Mais quels instants magiques on vivait ! On buvait les paroles du talentueux Georges Briquet qui était généralement l’envoyé spécial de la radiodiffusion Française pour décrire et faire vivre en direct les évènements sportifs.
C’est ainsi que l’on vécut toute la campagne Américaine de Marcel Cerdan, et après son tragique accident des Açores qui lui coûta la vie, celles de Laurent Dauthuille, de Robert Villemain et surtout du grand Ray Sugar Robinson, ses vaillants vengeurs et successeurs dans nos cœurs.
Un peu plus tard notre Jean-Claude Bouttier qui fit une magnifique carrière devint champion d’Europe et Challenger du grandissime mais truqueur Carlos Monzon, l’Argentin.
Jean Claude ne gagna pas son combat mais, Dieu que ce fut dur pour Monzon qui fut déclaré vainqueur en usant de tous les subterfuges possibles et imaginables pour venir à bout de notre petit Français.
Effet notre Bouttier National, l’allongea au tapis au 9° round et ce pour la première fois de la carrière de l’Argentin qui n’en revenait pas. On eut même l’impression que Carlos asphyxié par les coups reçus n’était pas loin de l’abandon. Mais ce vicelard usa de coups de pouces dans les yeux, de rabbit punches (coups derrière la tête) pour blesser volontairement notre champion qui fut obligé d’abandonner sur blessure. Mais aux yeux de ses fans dont je fais encore partie (lorsque je l’entends commenter les grands évents sur canal +), il en sorti grandi de ce combat de titans.
Pour en revenir à Ray Sugar Robinson ( le digne successeur de Marcel), il infligea une telle raclée au mafioso et tricheur Jake La Motta ( qui se félicitait de ne pas avoir donné sa revanche à notre Marcel) que ce dernier disparût à jamais du monde de la boxe.
Mais en Afrique du Nord, nous avions aussi des pugilistes de qualité :
* Omar Kouidri d’Alger, combattant valeureux et loyal s’il en fût, qui ne craignit pas d’affronter à quatre reprises notre grand Marcel, à l’apothéose de sa carrière, pour ne s’incliner à chaque fois, qu’aux points au grand dam de la presse spécialisée ; celle-ci, en effet, se plantait avec un vrai bonheur dans ses pronostics en lui prédisant une rapide défaite par KO.
* Kid Marcel (Bouaziz) l’Oranais, le maître à boxer, rival malheureux lui aussi de Marcel, vainqueur aux points.
* Gaëtan Annaloro, Le poids coq de Tunis, magnifique et élégant puncheur, grand rival du gitan Théo Médina, l’autre vedette Franco- Européenne de la catégorie , tous deux battus par Peter Keenan , l’Ecossais.
* Jo Ventaja, l’agent de police de Casablanca, bourré de qualités mais manquant d’ambition, avec aussi une grande carrière internationale.
* Robert Cohen de Bône, poids coq de qualité lequel après une brillante carrière amateur, devint champion du monde chez les pros, en battant aux points, chez lui à Bangkok, le Thaïlandais Songkitrat. Il conserva son titre pendant un ou deux ans en faisant match nul contre Willie Toweel, puis le perdit par arrêt de l'arbitre à la 7e reprise contre le sourd-muet Italien Mario d’Agata en 1956
Qui ne se souvient pas du regretté Alphonse Halimi, poids coq de haut niveau, et de sa déclaration « J’ai vengé Jeanne d’Arc » en redevenant champion d’Europe à Londres en 1960 en battant un anglais, dont le nom m’échappe. En 1957, il avait battu à Los Angeles, la petite terreur qu’était à cette époque Raul Raton Macias devant des milliers de supporters Méxicains, hostiles au petit frenchie. En 1959, il perdit son titre face à l’hispanique José Becerra et il faudra attendre 1989 pour avoir un autre boxeur français champion du monde de boxe, René Jacquot.
* De Hocine Khalfi, grand combattant sur tous les rings internationaux, vit toujours (Dieu Merci) une retraite bien méritée quelque part sur la côte Pacifique des Etats- Unis.,du côté de la Californie (USA).
* Du malheureux Mokfhi, mort à l’issue d’un combat malheureux contre... ?
* Du valeureux et élégant regretté Chérif HAMIA, combattant vaillant et émérite, qui mena une campagne glorieuse sur tous les rings internationaux.
En Oranie, nous avions aussi de bons boxeurs. Les terreurs du ring qu’étaient Bachir Cherraka, (le démolisseur) Lahouari Godih ( la liane), Abdesselem (le pit-bull), Boleda Francis (la castagne, hélas décédé en pleine gloire et trop jeune), Madani (le puncheur), RobertTerrones d’Aïn Témouchent (champion du monde militaire), l’élégant et redoutable puncheur Soriano., Bruno Spataro le roc., les frères Porcel (la classe). Etc... !
Lorsque des réunions étaient organisées à Bel-Abbès par Enrique Salas (manager de la Bel-Abbésienne), au foyer du Légionnaire ou à la piscine Cerdan, on se battait pour avoir des places autour du ring et voir à l’oeuvre ces grandes vedettes amateurs qui venaient se mesurer à nos Bel-Abbésiens, les vaillants Ernesto (tchato) Diaz (un ami intime perdu de vue), Hamzaoui, Manou Jorge, rival tenace et malheureux de Cheraka, son frère Elie (expatrié en Espagne à Alicante), Allouche, le rugueux Caparros, l’élégant Galliana, Reiffenberg le vaillant et courageux légionnaire, Molina Jeannot ( ce dernier est l’un des plus grands managers en activité en France). Il a été le manager-entraineur de Bénichou, ex champion du Monde et dirige une belle écurie à Marseille.
En France, justement, de bons pugilistes issus de l’immigration ont fait les beaux jours du noble Art, il y a peu encore.
* Hakim Tafer, redoutable et vaillant poids lourd, qui perdit son titre contre Anaclet Wamba.
* Laurent Boudouani, médaillé d’argent aux jeux olympiques, qui n’a pas confirmé en pro les promesses "Cerdaniennes" qu’il possédait.
* Khalid Rahilou, ex double champion du monde de boxe professionnelle et de Kick Boxing. Un phénomène !
* Mehdi Sahnoun, champion du monde après sa victoire par arrêt de l’arbitre sur Bruno Girard. Il perdit, malheureusement son titre contre l’Italien BRANCO vieillissant et truqueur, et ne récupéra plus son titre malgré son avidité de revanche et les qualités qu’étaient les siennes.
Le dernier en date, est le blond peroxydé Brahim Asloum, beau champion d’Europe des poids mouches depuis le 14 Novembre 2003, qui vient de quitter la boxe en pleine gloire. Il a été champion olympique de sa catégorie aux derniers jeux de Melbourne .Il était drivé par les frères Louis et Michel Acariès d’ Alger, dont l’aîné, Louis, arriva au championnat du monde, battu de justesse par le Portoricain Santos.
Non seulement sportif mais homme d’affaire avisé et ami de feu Robert Louis Dreyfus, Louis Acariès fut chargé du vivant de RLD, de faire un audit du mauvais fonctionnement de l’Olympique de Marseille et de proposer une organisation curative. Ce dont il ne se prive pas restant fidèlement aux côtés de madame Dreyfus, encore propriétaire de l’O.M, pour la protéger des « dents de la mer ».
Ce modeste récit n’a pour but que de tenter de hisser la mémoire de notre boxe au niveau de celle de notre foot (notre SCBA par exemple, meilleur club d’AFN, en deuil de quelques-uns de ses plus beaux fleurons :
* Lapeyrie le canonnier (lequel d’un shoot dont il avait le secret, brisa le montant vertical des buts d’un gardien)
* Pepe Domingo (le renard à moustaches, terreur de l’excellent goal Carrisio du Gallia Club Oranais),
* Maillol (son capitaine courage), notre vaillant arrière Marion et tenter de raviver des souvenirs qui me sont chers en les partageant avec tous les amateurs de boxe et de foot et ceux dont j’ai mentionné les noms, lesquels pour la plupart, hélas, ne sont plus de ce monde. Dieu les ai tous en sa sainte garde.
A propos de la descendance des sportifs, l’une qui mérite d’être portée à votre connaissance est celle de Pepe Domingo (Oncle de mon épouse), ses deux petits fils Thomas et Fabien sont deux gloires du rugby en France. L’aîné, Fabien, fut il y a peu, sacré meilleur joueur de l’année de division 2 et Thomas, son cadet, est international en titre de l’équipe de France dont il est l’un des plus beaux fleurons, malgré ses 1.72m, et ses 110 kgs de muscles. Un authentique pit-bull. Comme quoi « bon sang ne saurait mentir » et les chiens n’ont jamais fait des chats.
D’autres sportifs Nord Africains de valeur se sont distingués dans d’autres disciplines, car personne n’a oublié le grand Alain Mimoun, Alex Jany, Ben Barek, (la perle noire), Damitio (saut en hauteur) , nos nageurs Alfred Nakache de Constantine (Le "nageur d'Auschwitz), Alain Gotwallès…etc. J’en oublie et des meilleurs, mais personne ne m’en voudra de cela, ma mémoire me lâchant de temps à autre. J’espère et souhaite que d’autres amateurs de noble art me contactent et me fassent partager à leur tour cette belle épopée.
En conclusion, nous avons vécu une belle épopée sportive, LA-BAS, tant pugilistique, footballistique et dans bien d’autres disciplines.
Notre temps nous est en partie dérobé, en partie subtilisé et ce qui reste se perd sans qu’on y prenne garde. (SENEQUE)
Piednoirement votre.
Le 12 Février 2010