DE GAULLE ET NOUS
« C'est notre histoire »
En ce mois de novembre 2010, la presse écrite et télévisuelle a choisi de commémorer le quarantième anniversaire de la mort De Gaulle. Comment pourrions-nous l’oublier, lui qui rythme nos vies depuis 52 ans déjà ?
Un certain jour de 1958, Il a décidé de notre destin et jamais nous n’avons pu retrouver la paix qui précédait son retour au pouvoir.
Dans tous ces documentaires à la gloire du général, « l’affaire d’Algérie » est, pourtant, celle qui aurait dû primer sur toutes les autres actions et décisions qu’il aura prises pendant ces longues années à la tête de l’Etat français. Elle concerne des millions d’êtres qui ont vu leur vie basculer dans le néant des deux côtés de la Méditerranée.
Mais, parler de l’Algérie, c’était, aussi, dire l’escroquerie dont nous avons été victimes de sa part. Car, il nous a escroqués. Il nous a volé notre pays, nos vies, notre espérance, notre foi en la France.
Et c’était, aussi, dire de quelle manière il avait trahi son Armée. L’armée de France, dont des généraux, fidèles à la Patrie, avaient remis entre ses mains, le destin de millions de français.
Quel qualificatif peut-on donner à un chef des armées qui consent livrer au massacre pendant quatre longues années ses troupes, des jeunes de 20 ans, plutôt que d’avouer, immédiatement, qu’à des fins politiques et personnelles, il a menti sur ses intentions réelles ?
Et quel qualificatif peut-on attribuer à un chef d’Etat qui abandonne ses concitoyens aux pires massacres, après les avoir grugés à seule fin de revenir au pouvoir pour satisfaire son ego ?
Mais le mythe De Gaulle a la vie dure. Il est, encore de nos jours, difficile de ternir son image. Celle du libérateur de la France pendant la seconde guerre mondiale. Bien que quelques hommes ou femmes politiques reconnaissent publiquement que De Gaulle a menti ignominieusement dans l’affaire algérienne et qu’il nous a trompés avec une sérénité digne du plus grand escroc du XXème siècle, personne encore ne nous a donné l’occasion de nous exprimer sur les conditions de l’abandon anticonstitutionnel des trois départements français d’Algérie et du génocide des français d’Algérie qui en a résulté.
"France 5", la chaîne de télévision nationale, diffusera mardi 9 novembre 2010, à 20 heures 35, heure de grande écoute, un documentaire dans le cadre de sa nouvelle émission « C’est notre histoire » consacrée, pour cette première édition, à De Gaulle.
L’appel fait à tous les témoins ayant vécu « une histoire » les reliant à De Gaulle, pour qu’ils contribuent à cette émission, a eu un énorme succès, disent-ils.
De nombreux témoignages de français d’Algérie, entre autres, ont déjà été publiés sur le site de la chaîne. Seront-ils tous retenus ? Non. Le temps imparti à l’émission ne le permettait pas.
En deçà des témoignages écrits et envoyés, le documentaire sera suivi d’un débat. Débat enregistré dans les murs de l’Historial Charles De Gaulle aux Invalides.
Pourquoi avoir choisi ce haut lieu de « sa » mémoire si ce n’était pour lui rendre un fervent hommage ?
Mais alors, direz-vous, c’est une émission partiale ? Oui, on peut dire ça comme ça. Sauf que, pour que la crédibilité de la chaîne ne soit pas mise en cause, ont été consacrées, dans l’émission, quelques minutes à la guerre d’Algérie.
Quelques minutes - peut-être amputées – ont été imparties au représentant de la communauté des français de souche européenne en Algérie, pour dire ce que, tous, nous pensons réellement de De Gaulle et de sa politique algérienne honteuse.
Sur le plateau où étaient présents Michel Rocard (socialiste), Yves Guéna (gaulliste) et l’historien Fabrice d’Almeida (rocardien ?), interrogés par Marie Drucker, tous fort sympathiques au demeurant, le représentant de l’Algérie française n’a pas pu rétablir la vérité sur « notre histoire » qu’il s’apprêtait à défendre.
Manque de temps ? Censure, toujours ? Les deux à la fois, en tout cas.
L’excellent réalisateur et toute l’équipe de CAPA TV ont, un peu, fait oublier à notre ami l’inégalité de la représentation sur ce plateau. Deux à gauche et deux à droite « pour », un, seulement, « contre ».
Michel Rocard a quand même reconnu, du bout des lèvres, que De Gaulle "a menti…. Mais qu’il y était obligé ...( !)"
La torture a, bien sûr, été abordée mais notre représentant n’a pas eu le droit de réfuter les accusations faites à notre valeureuse armée. Notre temps était déjà consommé. Il fallait passer à « autre chose ». Un autre plateau. Une autre époque. D’autres témoins. Et toujours, De Gaulle, l’infaillible. Le Grand De Gaulle.
Un sentiment de frustration nous submerge. L’Algérie, notre Algérie, à peine évoquée comme un banal souvenir, noyé à jamais dans l’océan de l’Histoire de France.
Reste que ce contact nous aura permis de rencontrer un réalisateur honnête qui a envie d’entendre le son de cloche des français d’Algérie.
Pourquoi pas une émission entièrement consacrée au 19 mars 1962 et à ses conséquences ?
C’est ce que nous lui proposerons bientôt. Espérons que, ce qu’il pense être un tabou, ne se révèlera pas être, définitivement, une censure.
Que ce long monologue ne vous empêche pas de regarder l’émission.
Vous y pourrez, néanmoins, voir des vidéos témoignages envoyées par des français d’Algérie. Des images et des photos de notre passé, heureux malgré la guerre, seront diffusées.
C’est mardi, 9 novembre 2010, à 20 heures 35, sur France 5.
Magazine historique
Tout Public / Couleur / STEREO / 4:3
Résumé :
«Chaque Français fut, est ou sera gaulliste», disait Charles de Gaulle : avait-il raison ? Pour sa première édition, «C'est notre histoire», présenté par Marie Drucker, avec la participation de l'historien Fabrice d'Almeida, invite les Français à raconter «leur» De Gaulle. Ce nouveau magazine se veut la première émission de télévision contributive dédiée à notre histoire commune. Sur www.france5.fr/c-est-notre-histoire, les internautes peuvent en effet revivre les années du mandat présidentiel du général grâce à des archives de l'Ina ou bien publier vidéos, photos anciennes, anecdotes et témoignages. La diffusion d'un reportage sera suivie d'un débat en public, construit notamment à partir des récits des internautes.